Tuer, ne pas tuer, Tchinguiz Aïtmatov, Editions des Syrtes
"Très beau texte
Une prose claire, sobre et belle. Ce sont là les particularités de l’écriture d’Aïtmatov, redécouvert il y a peu grâce à sa Djamilia, une intemporelle histoire d’amour. Ici, encore un texte court, très court (au passage, sans jouer les rapiats, 10 euros pour 80 pages, c’est beaucoup), mais dense, et qui sait capter l’instant. L’instant d’avant, avant la guerre. Les pensées fugitives qui drainent l’esprit d’un jeune garçon plutôt niais qui va à la guerre, qui va à Stalingrad, sans savoir précisèment au devant de quoi il se rend.
Le texte est court et dense, mais les portraits, parfois juste esquissés en quelques phrases, sont toujours d’une justesse touchante. Ce petit peuple d’Asie Centrale, avec ses misères et ses grandeurs, ses prophéties et sa magie, c’est cela le cœur de l’œuvre d’Aïtmatov, qu’il s’agisse d’amour ou de guerre."
Citations :« Eh toi, c’est pas le puits qu’il faut regarder, tu m’en fais un beau perron en bois peint et sculpté ! Et tu vas à la guerre ! Regarde plutôt la fille, là-bas, qui tire l’eau du puits. Regarde comme elle est bronzée, avec sa blouse, comme elle est bien roulée, et quel derrière ! Et toi, tu me parle du puits ! Ah, le moine, à ta place, moi, je sauterais du train, et qu’on me compte avec les déserteurs ! »
p.29
Souffrance injuste
« Cela avait bien été comme la Gitane l’avait dit – une souffrance injuste. Cela voulait-il dire que la souffrance aussi pouvait être injuste ? »
p.63
« Les ennemis nous amènent la mort, et nous aussi, mort aux ennemis ! Et comment alors vivre après sur terre, seuls des tueurs resteront sur terre ? »
p.69