PARIS (AFP) - Le roman d'Alexandre Dumas, récemment exhumé de la Bibliothèque nationale de France (BNF), "Le Chevalier de Sainte-Hermine", un millier de pages d'aventures échevelées à l'époque du Consulat et de l'Empire, paraît vendredi en librairie, édité par Phébus.
"On imagine l'émerveillement de Claude Schopp, chercheur mondialement respecté, spécialiste d'entre les spécialistes de la vie et de l'oeuvre de Dumas, découvrant à la faveur d'un aimable hasard (mais le hasard existe-t-il?) un texte totalement ignoré qui se révéla être le dernier des grands romans de Dumas", écrit dans sa préface, le directeur de Phébus, Jean-Pierre Sicre.
"Si on trouve parfois sans chercher, c'est parce qu'on a longtemps cherché sans trouver", note pour sa part Claude Schopp dans une longue introduction au livre où il raconte sa traque pour mettre la main sur le manuscrit.
Ce roman inachevé avait été publié en feuilleton dans la presse en 1869 mais jamais édité sous forme de livre. Microfilmé par la BNF, accessible sur place aux chercheurs, l'exemplaire du "Moniteur universel" du vendredi 1er et du samedi 2 janvier 1869 publiait sur 12 colonnes, en bas de la première et de la deuxième page, le début du roman. Au total, il y eut 118 chapitres allant de manière irrégulière jusqu'en octobre 1869.
Il s'agit d'un roman d'aventures typiquement "dumasien" situé aux débuts de l'empire napoléonien. Il raconte le destin d'un aristocrate (qui donne son titre au livre) écartelé entre ses convictions royalistes et sa fascination pour Napoléon. On est plongé dans la bataille de Trafalgar, les persécutions de Fouché, on y rencontre Joséphine, Talleyrand, Chateaubriand ou le duc d'Enghien, on y découvre un Bonaparte à la personnalité complexe.
C'est son dernier roman, la fin de sa trilogie commencée avec "Les Blancs et les Bleus" et poursuivie avec "Les compagnons de Jéhu". D'ailleurs, "Le Chevalier de Sainte-Hermine" est parent d'hommes tués dans les deux précédentes fictions.
Ce livre, qui s'inscrit dans le vaste projet historique de l'écrivain, prend place juste avant "Le comte de Monte-Cristo" avec lequel il entretient d'étroites affinités. C'est en quelque sorte, explique M. Sicre, la "pièce manquante" dans ce projet romanesque de raconter toute l'histoire de France, de la Renaissance (avec "la Reine Margot") à son époque.
L'ouvrage a nécessité, de la part de Claude Schopp, des corrections car le manuscrit publié dans le journal n'avait pas bénéficié d'une très rigoureuse relecture, à cause des impératifs d'une impression quotidienne rapide. Le chercheur s'est aussi autorisé à ajouter "quelques lignes" pour achever un livre qui ne l'était pas tout à fait. Alexandre Dumas, malade, est mort en 1870.
Ce n'est pas la première fois qu'on assiste à ce genre de "découverte", l'écrivain étant connu pour son incroyable puissance de travail qui l'a amené à écrire quelque 250 livres, tous genres confondus. Homme à la prodigieuse vitalité, Alexandre Dumas a écrit des chefs d'oeuvre comme "Les trois mousquetaires", "Vingt ans après", "Le vicomte de Bragelonne", "La dame de Monsoreau" etc. La série de "Ses impressions de voyage" à travers l'Europe (1835-59) a fait par ailleurs de lui le premier maître du grand reportage. Il a été en 2002 le 6ème écrivain après Voltaire, Rousseau, Hugo, Zola et Malraux à entrer au Panthéon.
("Le Chevalier de Sainte-Hermine", éd Phébus, 1.074 pages, 26 euros)